Depuis plusieurs années, le leader kurde Abdullah Öcalan est soumis à un isolement sévère sur l’île-prison d’Imrali. Déjà privé de la visite de ses avocats depuis 2011, il n’a eu droit qu’à deux visites des membres de sa famille entre avril 2015 et aujourd’hui. Par cette pratique qui est en passe de s’étendre à tous les prisonniers politiques, la Turquie viole les conventions internationales et européennes des droits humains auxquelles elle est partie, en particulier la Convention européenne des Droits de l’Homme.
Depuis qu’elle a mis fin en avril 2015, de façon unilatérale, aux pourparlers de paix menés avec le PKK représenté par M. Öcalan, la Turquie s’est engagée dans une guerre anti- kurde, même au-delà de ses frontières territoriales. La répression, les violations des droits humains, voire les massacres, sont devenus le terrible quotidien des Kurdes et de l’opposition au Président turc Erdogan.
Le 7 novembre 2018, la députée kurde du HDP (Parti démocratique des Peuples) Leyla Güven a entamé une grève de la faim dans la prison de Diyarbakir où elle était détenue depuis janvier 2018. Elle a voulu, à travers cette action, dénoncer la montée de la dictature et du fascisme en Turquie, et rompre l’isolement carcéral imposé à Abdullah Öcalan, car, sans celui-ci, une reprise du processus de paix est impossible en Turquie. Grâce à la solidarité internationale qu’elle a suscitée, Leyla Güven a été libérée le 25 janvier. Cependant, elle poursuit son action chez elle, à Diyarbakir. Aujourd’hui, après plus de 4 mois de jeûne, elle se trouve au seuil de la mort.
A l’instar des plus de 7000 prisonniers politiques qui ont rejoint progressivement le mouvement lancé par Leyla Güven, un groupe de 14 personnes a entamé une grève de la faim à Strasbourg, le 17 décembre 2018. Des dizaines d’autres membres de la diaspora kurde à travers le monde sont également engagés dans cette action. Au Kurdistan, trois parlementaires du HDP ont rejoint le mouvement à compter du 3 mars : la jeune Députée de Diyarbakir, Dersim Dag, et deux Députés de Van, Tayip Temel et Murat Sarısaç.
Le mutisme et l’inaction des gouvernements et institutions européennes face à la montée du fascisme en Turquie conduisent de plus en plus de personnes à se donner la mort pour briser le silence et l’isolement : Le 20 février 2019, un militant kurde s’est immolé par le feu en Allemagne. Et depuis le 17 mars, sept prisonniers politiques, quatre femmes et trois hommes, ont mis fin à leur vie.
Bien qu’informés à maintes reprises de l’ampleur sans précédent prise par ce mouvement et des conséquences graves qui pourraient en résulter, le gouvernement français, les institutions européennes, en particulier le Comité pour la Prévention de la Torture (CPT), continuent à se murer dans un silence totalement irresponsable, violant ainsi les principes et valeurs mêmes qu’ils sont censés défendre.
La revendication des Grévistes de la faim est la nôtre:
Nous exigeons du Conseil de l’Europe et du CPT qu’ils accomplissent, enfin, leurs missions en agissant auprès de la Turquie afin de mettre un terme à l’isolement que le régime d’Erdogan, encouragé par le silence des institutions européennes, fait subir depuis des années à M. Abdullah Öcalan et qu’un processus de paix avec le mouvement kurde puisse reprendre en Turquie!